Récemment, inspiré par l’actualité, j’ai beaucoup réfléchi sur le sujet de l’immigration, en particulier, sur les différences entre le modèle de l’assimilation, comme celui adopté par France, et le modèle de multiculturalisme, comme celui adopté par les Etats-Unis. En gros, l’assimilation demande que les immigrés s’intègrent à la société du pays d’accueil rapidement et discrètement alors que le multiculturalisme demande que les autochtones tolèrent les différentes cultures et accueillent les changements.
En tant qu’immigré moi-même, je préfère évidement l’idée du multiculturalisme parce que ça me met plus à l’aise dans un pays étranger et ça m’encourage à montrer et à partager ma culture et mes origines. D’origine chinoise, j’aime bien visiter tous les quartiers chinois pendant mon voyage et observer la persistance et la prospérité de ma culture. Ça me réconforte de savoir que, même si on est loin de chez nous, on n’est pas du tout dissuadé de garder nos traditions et de faire ce qu’on fait depuis des générations.
Au contraire, dans le modèle de l’assimilation, le poids est placé sur les immigrés de se comporter comme un natif. A mon avis, l’idée est un peu similaire à celle de laïcité dans le sens où on demande à la minorité d’être discrète et de faire un effort, pas à la majorité. Personnellement, je trouve la demande injuste et l’idée qu’on ne voit pas le race si on n’en parle pas irréaliste et ridicule, et je n’ai jamais cru que ça marcherais en réalité.
Mais est-ce que c’est le cas dans la vraie vie ? Est-ce que la stratégie américaine marche mieux que la française ? Apparemment, je ne suis pas le seul dans ce débat ces derniers temps. Après la victoire de l’équipe de France à la coupe du monde, le comédien Américain Trevor Noah a suscité, probablement involontairement, une polémique en disant que c’est l’Afrique qui avait remporté le match. En retour, tout le monde est monté sur ses grands chevaux. D’abord, j’avais l’impression que c’était juste les politiciens français qui l’accusaient de promouvoir le sentiment raciste et en profitaient de souligner les valeurs de la société. Mais ma première impression s’est avérée fausse parce que, d’après les gens sur Twitter, il me semble qu’en fait tous les français étaient en colère. L’opinion générale, c’est qu’en France on ne peut pas décrire une personne d’après ses origines, contrairement aux Etats-Unis où on dit toujours les Américains Africains, les Américains Asiatiques, etc. Si on fait ça en France, on risque de donner l’impression qu’on ne les considère pas comme des français et donc d’être raciste. Le résultat ? Il me semble que, grâce à l’assimilation, la race a bien cessé d’être l’une des premières choses qu’on remarque en France. Bravo.
D’ailleurs, j’ai récemment entendu une histoire passionnante dans le podcast Transfert : pour passer sa dernière année au lycée à l’étranger, une jeune fille française a voyagé aux Etats-Unis et restait avec une famille dans le sud. Peu de temps après son arrivée, elle s’est rendu compte que les gens là étaient tous racistes : sa famille d’accueil l’a prévenu qu’il y a beaucoup de « noirs » dans son lycée, ses nouvelles copines blanches lui ont conseillé de ne pas parler avec « ce type », et elle a été interdit d’aller au promo avec un mec noir. Ses réactions? Au début, elle était choquée parce que personne ne parle ni ne réagit au race si frontalement en France, ce qui fait qu’elle n’avait jamais imaginé se comporter selon sa couleur de peau. Mais au fur et à mesure, elle est devenue de plus en plus comme les blancs autour d’elle et s’est aussi mis à garder sa distance des noirs. Autrement dit, elle est devenue, passivement mais sûrement, raciste elle-même. La morale de l’histoire, c’est qu’être raciste n’est pas du tout naturel. Par contre, c’est un choix et c’est facilement réalisable. En plus, la stratégie française a l’air d’avoir bien réussi à former les citoyens à être « daltoniens ».
Bien sûr, à cause de sa longue histoire de l’esclavage, il est plus difficile de se débarrasser du racisme aux Etats-Unis. Mais serait-il plus facile d’adopter la même stratégie qu’en France où on supprime toute la notion de la race ?
Potentiellement. Psychologiquement, si on veut vraiment éviter toutes les discriminations, quelle que soit la discrimination raciale, sexuelle ou religieuse, il faut d’abord arrêter remarquer ces différences-là entre les gens, comme ce que le politique français demande, au lieu de se rappeler de faire attention à ce qu’on fais quand on est exposé à la diversité, comme ce que le politique américain demande. Sinon, on risque de se forcer de cacher son vrai soi et se comporter civilement car on a peur des conséquences. En fait, dans l’élection américaine en 2016, beaucoup de gens ont voté pour Donald Trump parce qu’ils avaient l’impression d’être opprimés et critiqués à cause de ses points de vue racistes et xénophobe et donc, en votant pour un candidate avec la même réputation, ils demandaient la libération. Donc, suivant cette logique, il est plus pratique de suivre le modèle français, au moins l’objectif.
Mais à mon avis, c’est une solution temporaire. Une fois que les gens sont habitués à un certain race, c’est hyperoptimiste d’assumer qu’ils ne voient rien face à un nouveau. Par contre, je trouve le multiculturalisme une vraie solution parce qu’il enseigne aux gens à accepter et apprécier la diversité, un phénomène solidifié par la mondialisation. Bien sur il est extrêmement difficile à faire et aujourd’hui c’est encore largement une idéologie. Mais je crois que c’est une idéologie qui vaut la peine de réaliser. En plus, beaucoup d’études comme ça montrent que la diversité améliore la performance d’une équipe et d’une communauté par faisant sortir les membres de leurs zones de confort et ouvrant leurs esprits. Au contraire, si on assume et demande que tout le monde soit le même que nous, on risque de bloquer tous les avancements et d’être coincé dans le passé. Ça met les gens mal à l’aise au début bien sur, mais ça paye d’être défié.
Voilà, voici mes arguments pours et contres pour les deux modèles d’immigration et pourquoi, personnellement, je préfère le multiculturalisme. Qu’en-pensez vous ?